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Le Bouffon de la couronne
Catégorie : Aucune
Auteur/Autrice : Lafargue, Thibault
Il en faut des hasards du destin pour que Sebrain, jeune homme dédié à la religion du Triste, devienne Tirelangue, le bouffon du château de Belle-la-Ménure.
Suite à une terrible maladresse lors d’une rencontre diplomatique, il se voit nommé “bouffon” par le roi afin d’éviter un désastre. Ce mensonge le propulse au cœur des intrigues de la cour, où il découvrira à ses dépens la règle d’or du métier : un bouffon qui ne fait pas rire est un bouffon en danger…
Critique
Par Erkekjetter, le 23/04/2025
Le Bouffon de la couronne se présente comme un joli pavé, relié sous une couverture rigide fort bienvenue vu l’épaisseur du roman. En tout cas, il présente bien. À noter qu’il s’agit du premier tome d’un diptyque, dont la suite devrait paraître dans l’année.
Côté contenu, on démarre par une mise en place peut-être un peu longue. L’auteur nous présente le héros, mais aussi le cadre dans lequel il évolue initialement, qui tient du monastère sans en porter le nom. Si ce n’est pas inintéressant, il demeure que certains passages ne paraissent pas franchement utiles. Cela plante certes une ambiance, mais cela aurait pu être plus concis.
A contrario, une fois que Sébrain s’est vu nommé bouffon du roi, il saute très vite dans le grand bain. La mise en scène, à ce moment, peut paraître artificielle, la narration n’étant pas suffisamment maîtrisée pour que l’on oublie que l’auteur déroule sa trame, et que les événements ont donc une fonction spécifique. Ce défaut tend à s’atténuer par la suite.
Le texte baigne dans une ambiance grisâtre et poussiéreuse, entretenue à dessein, qui reflète l’univers dans lequel les faits se déroulent. La religion du Triste fait l’éloge de la tristesse et des larmes, on est donc raccord. La critique sous-jacente, en tout cas pour l’organisation religieuse et le dogme, reste toutefois assez convenue, jusque dans la mise en scène d’une Inquisition qui n’a rien à envier à celle que connut notre monde – et qu’il n’est donc pas difficile de condamner.
Il faut dire que la thématique globale du roman et le personnage du bouffon appellent nécessairement un propos politique (au sens large du terme), qui pour le coup peut s’avérer décevant. Le plus engagé concernera le racisme, pour le reste… Il y a certes interrogation des décisions du roi, et de ceux qui détiennent le pouvoir en général, mais ça n’est pas creusé. En filigrane, les représentants du pouvoir en question apparaissent dans une dimension très humaine, constellés de défauts, de failles, et coutumiers des faux pas, mais il n’y a pas vraiment de questionnement de l’organisation sociale. Tous les personnages appliquent une morale dans des nuances de gris, plus ou moins sombres. Au contraire, le peuple est présenté comme un bloc assez uniforme dans ses réactions – et pour le dire franchement, un bloc pas très malin.
On pourra regretter la tendance à résumer les relations amoureuses (et même le sentiment amoureux, d’ailleurs) à de l’attirance physique et des rapports sexuels. Là-dessus, le comportement de Sébrain peut interroger. Il est une assez bonne incarnation d’une masculinité peu consciente de ses privilèges et de sa position dominante, même s’il n’est pas au sommet de la pyramide des pouvoirs. Une scène en particulier me semble poser problème, en ce qu’elle montre l’effroyable banalité de la non-prise en compte du consentement (en d’autres termes, le viol) : tout concourt à excuser ce comportement, comme s’il s’agissait d’une petite erreur sans conséquences et non le symptôme d’un problème bien plus vaste. Pour pousser plus loin, on pourrait également se pencher sur le traitement réservé aux personnages féminins.
Concernant le héros, Sébrain ne se présente pas franchement comme un personnage attachant. Faillible, indécis, balloté par des événements qui le dépassent, il pourrait attirer la sympathie, mais il lui manque un socle « solide », un noyau de personnalité défini auquel il se tiendrait, des valeurs auxquelles il serait fidèle. Il donne globalement l’impression d’être une girouette. Pour ma part, en tout cas, je ne suis pas parvenue à dépasser l’indifférence qu’il m’inspirait.
Pour autant, Le Bouffon de la couronne n’est pas un mauvais texte, même s’il manque encore de maîtrise, à mon sens. À noter que l’auteur est scénariste, ce n’est donc pas tant la construction de l’histoire qui pourrait être améliorée, mais bien la façon de la raconter, la forme littéraire.
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