Hé bien tant mieux si mes divagations sont appréciée par certains ! On continue avec un nouveau cycle, ma lecture fantasy/s-f des vacances :
La Trilogie du Second ÉtherThe very nature of our dreams is changing. We have deconstructed the universe and are refusing to rebuild it. This is our madness and our glory.
Now we can again begin the true course of our explorations, without preconception or agenda.
Lobkowitz
Le cycle comprend trois livres, parus entre 1994 et 1996 :
Blood: A Southern Fantasy,
Fabulous Harbours et
The War Amongst the Angels. Aucun des romans n'a été traduit en Français. J'ai l'édition omnibus de Gollancz de 2013 qui porte le nom général
The War Amongst the Angels.
La série semble relativement obscure, même pour du Moorcock hors Elric. Elle n'est pas référencer sur ce site, et de manière générale j'ai l'impression que peu de monde sont au courant de son existence. Pourtant, si on doit croire l'interview de Michou de 2009 que vous avez traduite (
http://www.elbakin.net/interview/traduction/Interview-generale-et-complete-de-Mickael-Moorcock), c'est un de ses travaux dont il est le plus content. (voir la dernière question) Et je vais joindre mon avis au sien parce que..
C'ÉTAIT TROP BIEN !
Bon alors je préviens tout de suite que je comprend quand même pourquoi la trilogie est moins célébrée qu'Elric ou Corum. Le tout reste très particulier, expérimental et imparfait. Mais, malgré quelque réserves, j'ai adoré. Pour faire plus en détail, je vais parler de chacun des trois tome séparément.
Blood: A Southern FantasyComment résumer ? Si le livre a bien une histoire, c'est avant tout un roman d'ambiance, celle, comme le nom l'indique, de la moiteur d'un Sud des États-Unis de fantasy. La majorité du roman se passe dans un monde parallèle dont les sources d'énergies se tarissent. Pour y pallier, les hommes ont commencé à exploiter les "Couleurs", sortes de flaques d'énergie pure. Malheureusement, ils ont fait un trou jusque dans la "Matière Source du Multivers", créant une gigantesque Fracture qui absorbe ce qui reste d'énergie dans ce monde dans la technologie régresse, faute de ressources. On a un monde donc assez original, mais qui reste par différent points typiquement moorcockien : d'abord, l'aspect "mort entropique de l'univers". Ensuite, il reprend le motif de la race dominante décadente remplacée par les autres, comme les Melnibonéens d'Elric ou les Vadhaghs de Corum (qui était eux-même des variations sur les elfes de Tolkien), mais cette fois-ci, ce sont les Blanc ! On se retrouve dans une atmosphère sudiste où le racisme est cette fois dirigée contre les
whiteys, la race qui a conduit le monde à la ruine, qui parlent leur patois, un mélange de Français, d'Espagnol et d'Anglais, avec un zeste d'Allemand et une grammaire branlante. On y suit Jack Karaquazian, Colinda Dovero et Sam Oakenhurst, des
jugadors, joueurs professionnels spécialisés dans un mélange entre le poker et une version très poussée des jeux vidéo
Civilization, qu'ils simulent (les jeux électronique ne marchant plus, sauf au
Terminal Café, à la périphérie immédiate de la Fracture) à l'aide de bulles de gaz dans des bouteilles...
L'aspect foutraque et imprécis de cette description n'est pas (seulement) de mon fait : Moorcock joue tout dans la suggestion, amenant petit à petit différent aspect de son monde bigarré, et chargeant son lectorat de reconstituer l'image globale. Si on préfère les univers détaillés, expliqués et décrits en long et en large, je doute qu'on y trouve son content. En revanche, si on aime les description qui laissent de la place pour l'imagination de la lectrice ou du lecteur, c'est ici fait d'une main de maître. L'auteur trouve la juste mesure pour avoir un univers cohérent tout en enflammant l'imagination de quelques phrases bien placées. Et quel univers ! Mon résumé, qui déjà semble partir dans tous les sens, reste bien incomplet. (Par exemple, la Nouvelle Orléans est sous la coupe de mafieux sado-masochistes obsédés des modifications corporelles qui font régner l'ordre par des robots avides de chair humaine..)
Et ce n'est pas tout ! Le roman est divisé en quatre parties (dont la dernière est très largement la plus longue), entrecoupées par de courts extraits de "Corsaires du Second Éther", roman-feuilleton
pulp, quasi incompréhensible, racontant la lutte sans fin des Ingénieurs du Chaos contre la Singularité dans le Second Éther.
Alone, Captain Billy-Bob Begg has tested the million roads, and imprinted herself with a map of the multiverse only she will ever be able to read. She is the greatest of the so-called CHAOS ENGINEERS who, using the principles of self-similarity, pilot their peculiar craft up and down the scales. They call this process 'folding', a kind of blossoming movement wich enables their ships to progress in as series of 'folds' in wich they 'lock scale' with a number of proscribed multiversal levels.
Qu'est-ce que le Second Éther ? Et bien... ce n'est jamais vraiment expliqué, encore une fois. Mais cela semble être l'ensemble du multivers, considéré comme un espace fractal, dans lequel des vaisseaux spatiaux sautent d'un univers à l'autre, mais le tout est, à la lecture, ressentis plus que compris. Le combat entre les Ingénieurs du Chaos et la Singularité est encore un combat entre l'Ordre et le Chaos, comme souvent chez MM, mais cette fois-ci, contrairement aux aventures d'Elric ou de Corum, ce sont les agents de la Loi qui prennent le rôle des "méchants". Les Ingénieurs du Chaos ont touts des noms improbables, leurs vaisseaux semi-organiques encore plus (ma préférence ira toujours au
Now The Clouds Have Meaning), et luttent contre la Singularité, qui rejette tout diversité et veut imposer son uniformité sur tout le Second Éther.
The slogan of the wild-eyed Chaos Engineers, who cruise the Second Ether for adventure, curiosity and massive profit, is 'Ride With The Tide', while the Voice of the opponents bellows for ever that 'The Singularity Must Hold: One Refuses To Fold'.
Les deux histoire convergeront à la fin, après que Rose Von Bek, mi-femme mi-plante, aura emmené Jack et Sam participer au
Zeitjuego, l'éternel Jeu du Temps, mélange de jeu de rôle, de black jack, de mathématiques et de commedia dell'arte, dont les répercussions métaphysique se ressentent dans chaque plan du multivers.
Voilà, en gros.
Et c'était génial. Moorcock est au sommet de son art, son écriture sobre et mélancolique, puissante et suggestive, les personnages travaillés, complexes. Le roman n'est pas pour tout le monde, je pense, mais original, et intéressant à de multiples points de vues.
Ho, et à la fin...
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je croit que les héro créent la Balance Cosmique ? Si j'ai bien comprit ? Intéressant, du point de vue du méta-cycle multiversel.
(pour contrebalancer tout de même cette avis dithyrambique, je me dois de préciser que je ne suis pas un lecteur extrêmement accompli, peut-être que mon appréciation aurait été mitigé en ayant lu plus de fiction de ce style qui mixe tous les genres de l'imaginaire ("new weird", "slipstream" ?), et a sans doute été favorisée en étant mon point d'entré dans ce monde littéraire)
NB : Ce roman est très indépendant du reste du méta-cycle du multivers (le reste de la trilogie le sera moins) tout en s'y insérant sans problème, ce qui est assez agréable.
(mais quel énorme pavé, désolé c'est indigeste quelle horreur)