A première vue, Ordinary Monsters semble on ne peut plus classique, aussi bien dans son fond que dans sa forme, d'ailleurs. On se retrouve a priori en terrain (bien) connu, ce qui en soi n'a jamais empêché de belles réussites.
Les premières pages se révèlent conformes à ses attentes. Il faut dire aussi que l'auteur prend son temps pour mettre en places les différentes pièces de son plan, que ce soit au niveau du cadre ou des "pions" qui vont finir sur le damier. Pendant un certain temps, on se demande de quelle manière toutes ces pistes lancées au départ vont trouver le moyen de se rejoindre, pour prendre de l'ampleur. Tout ce qui concerne le passé n'est pas dénué de matière, au contraire, mais le livre acquiert un rythme nouveau une fois les uns et les autres placés sur le même plan.
Les personnages évoqués, parlons-en justement : J.M. Miro, au fil du roman, les approfondie de fort belle manière et entretient en conséquence, au bout du compte, une ambiguïté morale qui constitue l'une des forces du roman et qui donne lieu à quelques scènes assez "rudes".
Le roman lui-même n'en manque pas, de forces : si les protagonistes mettent un certain temps à se révéler et par ailleurs à devenir un tant soit peu attachants, le monde dans lequel ils évoluent possèdent de nombreux atouts pour intriguer le lecteur, même si l'on songe souvent, en apparence, à un "simple" mélange entre, disons, les X-Men, A la croisée des mondes et Miss Peregrine. De bien belles références, certes, mais qui n'ont d'intérêt que si l'on est capable de les digérer pour servir quelque chose d'inédit.
Pour la dimension inédite, il faudra donc repasser, ou, du moins, attendre les tomes suivants de ce qui est censée devenir une trilogie, là encore sans surprise. Mais la mise en scène, le cheminement global de cette histoire et le clair-obscur qui ne la quitte jamais (Rien n'est tout blanc ou tout noir, ni pile, ni face, mais sur la tranche...), constituent de réels plus. En revanche, de bout en bout, le roman s'avère tout de même très, très verbeux et tout le monde n'appréciera pas cette dimension que l'on ne peut mettre de côté.
Bien écrit, dense mais avec un certain goût pour les longueurs, Monstres Ordinaires mérite toutefois le coup d'œil.
— Gillossen