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Un entretien avec Chris Evans !
Par Palinka, le dimanche 18 mai 2008 à 17:00:15
2008 s’annonce comme une autre grande année pour les fans de fantasy, mais rien ne nous plaît plus que de découvrir une toute nouvelle voix dans le genre. C’est donc avec un grand plaisir que nous présentons aux lecteurs Chris Evans, dont le premier roman s’intitule « A Darkness Forged In Fire », Book One of The Iron Elves.
Celui-ci est prévu en Amérique du Nord le 8 juillet 2008, puis au Royaume-Uni le 1er septembre.
Dans un monde impitoyable rempli de conflits violents – où les mousquets et les cannons, les arcs et les flèches, la magie et la diplomatie sont autant d’armes au sein de l’Empire Calahrien – nul ne peut nier que Konowa Swiftdragon, ancien commandant des Iron Elves de l’Empire, ne peut pas être considéré comme ordinaire. Il a assassiné un Viceroy, est passé devant la cour martiale, a vu son régiment adoré démantelé et a finalement été banni et envoyé dans le lieu qu’il méprise le plus – la forêt. Maintenant, tout ce qu’il veut, c’est qu’on le laisse tranquille… mais pour Konowa, rien n’est jamais aussi simple.
Une Étoile Filante Rouge à l’est proclame le retour de la magie disparue de la surface de la terre depuis longtemps et provoque une course frénétique dans l’Empire : c’est à celui qui atteindra l’Étoile le premier. Aujourd’hui, Konowa doit reprendre du service, et on lui demande de reformer les Iron Elves – seulement, ses nouveaux soldats ne sont pas tout à fait ce qu’il espérait. Et pire encore, leur principal adversaire dans la course à l’Étoile n’est autre que la redoutée Shadow Monarch – une sorcière-elfe dont les machinations pour la domination totale vont plus loin encore que Konowa ne pourrait jamais l’imaginer…
Questions et réponses avec l'auteur
Q : La sortie de votre premier roman, « A Darkness Forged In Fireº: Book One of the Iron Elvesº» est prévue pour le 8 juillet 2008 en Amérique du Nord chez Pocket Books, et doit être suivie par la sortie au Royaume-Uni le 1er septembre. Avant que l’on parle du livre cependant, pouvez-vous nous parler un peu plus de vous ? Par exemple quand avez-vous su que vous vouliez être écrivain, pourquoi écrivez-vous, et quels sont certains de vos auteurs préférés ?
Chris : Je suis écrivain depuis que j’ai commencé à lire. Je me souviens avoir été très tôt inspiré par les livres pour créer mes propres mondes et partir pour des aventures que j’inventais moi-même. J’adore écrire, même s’il y a des moments où cela peut aussi être extrêmement frustrant.
Il y a beaucoup d’auteurs que j’adore, même s’ils ne sont pas forcément tous très connus des lecteurs de fantasy. Terry Pratchett me fait tout simplement mourir de rire. Cet homme est un génie. Je jure que je me suis refait mal à une côte que je m’étais cassée en jouant au hockey il y a plusieurs années à force de rire en lisant « Timbré ». J.K. Rowling m’a impressionné dès le début, pas uniquement par sa manière de raconter des histoires mais aussi par son utilisation habile de la mythologie et du symbolisme. Le fait qu’elle donne l’impression que c’est naturel en dit long sur ses capacités. George MacDonald Fraser est un autre de mes auteurs préférés, autant pour sa série Flashman que pour ses œuvres hors fiction, et tout particulièrement ses mémoires de la Seconde Guerre Mondiale, « Quartered Safe Out Of Here ». Bernard Cornwell et Rudyard Kipling font toujours partie de mes livres de chevet. Tous deux m’ont beaucoup inspiré pour la série des Iron Elves.
Q : Pourriez-vous développer un peu sur le chemin que vous avez parcouru pour trouver un éditeur, ce que vous pensez de Simon & Schuster, et ce que vous pensez que l’éditeur a vu dans le livre ?
Chris : Je pense que mon voyage a débuté le jour de ma soutenance de mémoire pour mon Master. Je suis rentré chez moi cet après-midi-là et je me suis mis à écrire. C’était en 1998. Je me suis retrouvé face à un choix à faire entre poursuivre ma carrière académique en me lançant dans un doctorat, ou essayer autre chose. J’ai passé les deux années suivantes à me demander si j’allais poursuivre le doctorat ou non. J’ai commencé à écrire des histoires courtes et à travailler sur un roman entre mes travaux de recherche pour l’université. À l’été 2000, j’ai été accepté au Clarion East Workshop (NdT : un atelier pour les auteurs de fantasy et SF, à l’université du Michigan) et tout est parti de là. Pendant que j’étais là-bas, j’ai vendu une nouvelle, et une autre a fini deuxième au Toronto Star Short Story Contest.
Le dernier coup dur pour le doctorat a été lorsque Gavin Grant m’a dit que les éditions Del Rey cherchaient un éditeur qui connaisse la SF, la fantasy et les histoires militaires basées sur des faits réels. J’ai envoyé mon CV par e-mail, plus pour rire qu’autre chose, et je n’y ai plus repensé jusqu’à ce que je reçoive un coup de téléphone de Steve Saffel qui voulait qu’on parle du poste. Mon idée, c’était que si j’avais le poste, cela me conduirait au cœur du monde de la publication New-yorkaise, et qu’ainsi je pourrais faire lire mon travail facilement. Ha ! J’ai eu le poste, et bien sûr je me suis complètement plongé dedans, et j’ai très peu écrit. La situation est restée à peu près la même pendant les quelques années qui ont suivi, même lorsque j’ai commencé mon emploi actuel chez Stackpole.
Au bout d’un moment cependant, je me suis rendu compte que si je voulais être publié un jour, je devais m’y mettre sérieusement, alors j’ai commencé à me lever à 6 heures tous les matins et à écrire avant d’aller au travail. Être éditeur dans le domaine ne signifie, au final, absolument rien si vous n’écrivez pas. La plupart des éditeurs sont des auteurs cachés, mais vous ne sortez de votre cachette que si vous faites la même chose que tous les autres auteurs et présentez un manuscrit. Le mien a cherché preneur et m’a finalement permis d’avoir un très bon contrat avec Pocket Books que j’étais ravi d’accepter. La publication est une activité aussi subjective que possible, donc tout ce que je peux vous dire c’est que les gens de Pocket Books ont aimé ce qu’ils ont lu. Je pense qu’ils y ont vu une voix et un style qui sortent un peu des sentiers battus. S&S UK, qui a aussi acheté la série, a également répondu favorablement à cette approche.
Pour moi, les éditions S&S m’impressionnent par leur énergie et leur détermination à se développer dans le domaine de la fantasy en livre relié, et j’étais très enthousiaste à l’idée d’en faire partie. Si j’avais été publié par une des maisons d’éditions bien ancrées dans le domaine de la fantasy, mon livre aurait été un parmi tant d’autres, mais avec Pocket, mon livre est quelque chose de nouveau, et j’adore les défis que cela implique.
Q : Alors comment avez-vous prévu de fêter la publication de votre premier livre ?
Chris : Je n’en ai pas la moindre idée pour le moment. Vous devez penser que je devrais, ou que j’aurais une idée, mais je n’y ai vraiment pas pensé. Si quelqu’un ici a des idées, je suis ouvert à toute proposition.
Q : Comme vous l’avez dit, vous travaillez pour Stackpole Books, vous éditez des « livres sur l’histoire militaire, d’évènements/conflits historiques et actuels ». Visiblement, c’est un peu différent de votre roman de fantasy épique, mais comment votre expérience en tant qu’éditeur vous a-t-elle aidé/influencé pour écrire « A Darkness Forged In Fire », et quel effet cela fait-il de se retrouver de l’autre côté de la barrière ?
Chris : Il est évident qu’éditer de l’histoire militaire a eu un grand effet sur mon écriture, et j’espère que les lecteurs verront cela dans un sens positif. Bon nombre des auteurs que je publie ont été soldats, ce sont des vétérans qui ont été au combat, se sont fait tirer dessus et ont pris des vies. Leurs expériences ne sont ni glamours, ni communes. Une seule pression sur la détente peut valoir une médaille, une vie entière à faire des cauchemars, ou être rapidement oubliée. Cela m’a toujours sidéré de voir à quel point la vie d’un soldat est extrême et triviale. C’est ce que je voulais lire dans la fantasy, et à quelques exceptions près, cela a rarement été le cas. Techniquement parlant, être éditeur signifie que je sais comment les choses fonctionnent de l’intérieur, ce qui signifie que je suis potentiellement fatal au processus, donc je fais de mon mieux pour laisser Pocket Books faire les choses à leur manière et ne pas trop m’impliquer ou critiquer les décisions après coup. Je viens d’avoir ma première séance de dédicace à la New York Comic Con où j’ai signé des exemplaires préliminaires et eu l’occasion de discuter avec des lecteurs. C’était la première fois que j’étais l’auteur et pas l’éditeur debout à quelques mètres de là. Un sentiment étrange mais agréable. Le plus agréable était peut-être de discuter avec des lecteurs qui espéraient vraiment que tout irait bien pour moi, surtout lorsqu’ils ont appris que c’était mon premier livre. Cela m’a touché et comme on dit, on n’oublie jamais la première fois.
Q : Puisque « A Darkness Forged In Fire » est votre premier roman, quel a été selon vous le plus grand défi dans l’écriture du livre ? Et qu’est-ce qui a été le plus facile ou le plus enrichissant ?
Chris : Pour moi, écrire commence dans une frénésie folle alors que je me bats pour donner du sens à une idée qui a soudain retenu mon intérêt. Plus tard, cette frénésie se calme et devient un processus plus profond, et il y a des jours où je me suis demandé si le vent se lèverait et gonflerait mes voiles à nouveau. Par chance, le vent ne s’est jamais calmé longtemps et j’ai toujours pu reprendre rapidement l’histoire et trouver quelque chose de nouveau pour me faire avancer. Pour être tout à fait honnête, « A Darkness Forged In Fire » est et n’est pas mon premier roman. J’ai écrit quelque chose de la longueur d’un roman avant, qui est un assemblage sommaire de mots qui ressemble vaguement à une narration qui un jour peut-être, sera réécrit et deviendra un vrai roman, mais cela m’a servi à voir que j’étais capable de le faire.
Q : Alors, de quoi parlait cet assemblage ;) ?
Chris : C’était une histoire située dans une version fantasy « évoluée » du XXème siècle complet avec la science et la technologie, avec un monde sur le point de tomber dans une guerre mondiale. Mon idée ressemblait à cela – si vous étiez un humain vivant aux côtés des elfes et les elfes vivaient des milliers d’années, ne voudriez pas en profiter un peu ? Et si les elfes ne voulaient pas partager leurs secrets, que feriez-vous pour les obtenir ? Si vous viviez dans un monde de science, est-ce que quelqu’un quelque part ne commencerait pas à plonger dans ces mystères ? Et pour chaque scientifique cherchant des remèdes, vous savez que d’autres chercheraient à faire des armes. Ce serait la toile de fond d’un monde en guerre, opposant les races, les cultures, les mœurs, la magie et les sciences. La géopolitique et la science opposées à la thaumaturgie. À bien des égards, cette expérience m’a conduit à ce livre (« A Darkness Forged In Fire »), qui reste bien plus proche de ce que nous connaissons, en tout cas en fantasy traditionnelle.
Q : D’après certaines présentations préalables que j’ai pu lire, « A Darkness Forged In Fire » a été décrit comme une histoire de fantasy « palpitante » et « réaliste » dans la veine de Tolkien, Glen Cook, Bernard Cornwell et quelqu’un a même mentionné Napoléon. Comment décririez-vous « A Darkness Forged In Fire » et qu’est-ce qui vous a influencé lorsque vous écriviez ce livre ?
Chris : Avant toute chose, « A Darkness Forged In Fire » est une histoire de fantasy que j’ai toujours voulu lire. Je voulais voir à quoi le monde et les clichés et les races de Tolkien ressembleraient 500 ans plus tard. Tant d’auteurs ont exploré la fantasy dans des décors médiévaux d’Europe de l’ouest, et l’ont très bien fait, que je savais que si je voulais écrire une histoire je devrais choisir quelque chose de différent. En même temps, je voulais reconnaître cette histoire et l’utiliser comme tremplin, ce que j’ai essayé de faire. Donc par exemple, il y a des elfes dans ce monde, mais tous n’ont pas pour les arbres et la nature la même attirance que Legolas.
Comme je l’ai dit plus tôt, Rudyard Kipling m’a beaucoup influencé, en particulier ses poèmes sur le soldat britannique et sur l’impérialisme et le colonialisme. La série Sharpe de Bernard Cornwell est une autre référence que je reconnais volontiers. Et puis il y a des historiens – John Keegan, Len Deighton, Terry Copp, Richard Holmes et Barbara Tuchmann. Cela doit sembler bizarre de faire une liste d’historiens pour une histoire de fantasy qui n’est pas historique, mais ils m’ont inspiré, par leurs prouesses narratives plus qu’autre chose. Enfin, et c’est peut-être le plus important, il y a George MacDonald Fraser. Le tableau qu’il a dressé de sa période dans le neuvième bataillon pour la défense des colonies britanniques durant la Seconde Guerre Mondiale dans « Quartered Safe Out Here » est sans doute (et je le soutiendrai) le meilleur essai jamais écrit sur la Seconde Guerre Mondiale.
Q : Eh bien vous n’êtes pas le seul à vouloir lire quelque chose de différent dans la fantasy d’aujourd’hui. En fait, il semble qu’il y ait un certain nombre d’auteurs qui écrivent des livres de fantasy plus crus, plus sombres, plus réalistes ou qui essaient ouvertement de défier les styles traditionnels comme ceux de Steven Erikson, Joe Abercrombie, Richard K. Morgan (The Steel Remains), David Keck, Alan Campbell, Tim Lebbon, Paul Kearney, etc. Que pensez-vous de ce mouvement, de la réponse du public à de tels livres, et des clichés de la fantasy en général ?
Chris : C’est normal que chaque genre, discipline – ou quoi que ce soit – évolue, ou du moins, mute. En fait c’est crucial pour rester vivant et intéressant. En même temps, cela sert à faire redécouvrir les livres qui ont posé les bases du genre à des lecteurs qui ont pu commencer par quelque chose de nouveau et/ou de différent et se demander ensuite à quoi réagissait cet auteur. Je pense que c’est une tendance saine, mais qui risque fort d’être mal comprise. Le fait même que l’on parle de genres dessert de nombreux livres et auteurs, et cependant, sans cette structure, on passerait beaucoup de temps à chercher les livres sur les étagères. J’imagine que c’est un mal nécessaire, mais qui n’a pas besoin de s’accomplir de lui-même. Je vois des livres présentés comme étant de la high fantasy, fantasy traditionnelle, épique, urbaine, érotique, steam fantasy, etc., et je vois cela comme un esprit de tribu. Nous aimons nous voir comme faisant partie de quelque chose, puis développer et élaborer une série de règles grâce auxquelles nous nous identifions les uns les autres y compris à travers les livres que nous lisons. Cependant, qu’est-ce que cela a à voir avec le fait d’apprécier une histoire ? Ce n’est pas un cours de littérature comparée dans le domaine de la fantasy. C’est le grand monde merveilleux des choix de divertissement illimités, et nous essayons tous d’avoir une part du gâteau. J’espère que de bons vieux lecteurs démodés liront mon livre. Que ce soit ceux qui se disent « fantasistes », des adeptes de romans grand public ou d’autres genres dont je n’ai jamais entendu parler n’a pas la moindre importance.
Pour ce qui est des clichés, eh bien, c’est un terme que je me surprends à employer à mon grand regret. Merde, un garçon rencontre une fille, c’est un cliché. L’amour sans retour, c’est un cliché. Les histoires de détectives, les romans à l’eau de rose, les livres policiers et tous les autres genres et sous-genres ont leurs lieux-communs. Tous ceux qui liront « A Darkness Forged In Fire » trouveront des tropes intacts, et d’autres plutôt massacrés. C’est un peu comme faire la cuisine, en fait, les ingrédients les plus simples peuvent faire le meilleur des plats, s’ils sont mélangés et cuisinés comme il faut. Les tropes ne sont pas différents. Tout dépend de la manière dont on les utilise.
Q : Alors, quand et comment vous est venue l’idée des Iron Elves en premier lieu, combien de temps avez-vous travaillé dessus et à quel point a-t-elle évolué depuis sa conception originale ?
Chris : Je ne suis pas sûr du moment où l’idée m’est venue, parce que la période de gestation a probablement débuté dans ma jeunesse. Je n’arrêtais pas de lire des histoires dans lesquelles les châteaux, les épées et les dragons avaient une place prépondérante et je me surprenais à vouloir quelque chose de différent. Encore une fois, ce n’est pas que je n’aimais pas ces histoires, je les aimais et c’est encore le cas aujourd’hui, mais je commençais à penser qu’il pouvait y avoir d’autres manières de faire dans ce genre. L’idée générale du livre est restée quasiment la même par rapport à ma vision initiale, même si l’intrigue a changé plus d’une fois.
Q : En parlant de la série, combien de volumes avez-vous prévu, où en êtes-vous du prochain livre, et pouvez-vous nous dire quoi que ce soit à propos du second ?
Chris : Attention ! Pour le moment, la série est censée compter trois livres. J’ai des idées pour des livres supplémentaires qui à la fois continuent la trame de l’histoire et partent aussi dans d’autres directions, mais pour l’instant j’en vois trois, y compris la scène finale. J’adorerais vous parler du livre deux, mais je fais partie de ces auteurs qui ont besoin de garder leurs idées sous pression et constamment en mouvement jusqu’à ce qu’elles soient écrites de peur de perdre le fil. Ce que je peux vous dire, c’est que le livre 2 sortira à l’été prochain et le 3 suivra à l’été 2010. Après cela, qui sait ?
Q : Pour certains auteurs, c’est plus facile d’écrire leur second livre, alors que pour d’autres c’est plus difficile. Comment les choses vont-elles pour vous avec le livre deux et avez-vous appris quelque chose en écrivant « A Darkness Forged In Fire » qui vous ait permis de vous préparer pour le nouveau livre ? Dans le même genre, il semblerait que « Iron Elves » soit une trilogie, donc le Livre Deux va-t-il souffrir de tendances de « livre du milieu » ?
Chris : Ne me lancez pas sur le sujet des livres de remplissage ou des romans ponts ! Avec mon statut de romancier débutant qui doit cependant écrire le deuxième volet d’une trilogie, je ne vois tout simplement pas de bonne excuse pour les livres qui servent de bouche-trou. Je serais mortifié si mon deuxième livre était perçu comme autre chose qu’une histoire à part entière. Bien sûr, il va continuer les grands lignes de l’intrigue principale et mettra en place des évènements en vue du troisième livre, mais ce n’est pas une raison pour ne pas avoir une histoire engageante. J’en ai écrit la moitié pour l’instant et je suis très conscient de la nécessité de lui donner une existence propre. Je n’ai pas plus envie d’écrire sur des personnages qui tuent le temps que les lecteurs de le lire. Le deuxième livre a un but, une intrigue et un besoin manifeste de faire mieux que le premier.
Q : C’est bon à entendre ! Pourriez-vous être impliqué dans d’autres projets d’écriture ?
Chris : Je fais partie de ces auteurs qui donnent du fil à retordre aux éditeurs et aux agents. J’ai autant d’idées qu’un lapin a de portées, un lapin vraiment très amoureux. En résumé, il n’y a pas de fin à ce que je veux écrire après, mais étant donné que je sais, ou du moins que j’accepte pour le moment la nature limitée dans le temps de la condition humaine, je ne travaille que sur deux ou trois autres projets en même temps.
Q : Dans la fantasy épique, certains auteurs aiment mettre l’accent sur les personnages ou la construction du monde, d’autres sur la manière de raconter l’histoire. Où vous placez vous dans ce schéma, et quelle est selon vous votre force en tant qu’auteur ? Et quelles sont vos faiblesses ou les domaines dans lesquels vous aimeriez vous améliorer, en particulier dans les prochains livres ?
Chris : Je suis à fond sur les personnages et la narration. Si le personnage est assez fascinant, je le/la suivrai jusqu’au bout du monde et au-delà. Qui, parmi nous, n’a jamais souhaité faire partie de la Communauté de l’Anneau ? Même les acteurs qui ont joué les personnages se sont tous fait faire des tatouages pour symboliser leur lien. Je pense que les lecteurs sont attirés par les personnages d’une manière presque identique, quoique moins douloureuse. Nous créons une relation avec ces personnages qui dure souvent bien plus longtemps que l’intrigue ou le monde ou tout autre aspect de l’histoire. J’aime aussi les histoires avec du rythme. Je n’ai jamais fait partie de ceux qui se vautrent dans le luxe de la prose (ni de ceux qui s’étalent sur une plage ou s’assoient dans une baignoire d’ailleurs) donc les lecteurs qui recherchent cela risquent d’être déçus en lisant mon histoire.
J’aimerais penser que je suis un auteur complet, aussi doué pour la construction du monde, l’intrigue, la narration et le reste, mais je peux encore largement m’améliorer. En fait, j’attends avec impatience de m’améliorer à chaque livre et d’apprendre de nouvelles techniques au fur et à mesure. N’importe quel auteur peut sans aucun doute vous donner une liste interminable de domaines dans lesquels il peut s’améliorer, et je ne suis pas différent à cet égard, mais pour le moment, je vais laisser cela aux lecteurs serviables trop désireux de poster leurs critiques sur Amazon ou ailleurs.
Q : Pouvez-vous nous en dire plus sur le monde dans lequel Iron Elves se situe et sur certains des personnages principaux de la série ?
Chris : Malgré ma formation en histoire, ce n’est pas de la fiction historique. Cela dit, certaines formes et couleurs du monde ont été empruntées à l’Inde, à la culture des Amérindiens, au système de régiment britannique et aux Guerres napoléoniennes. En ce qui concerne le thème, l’accent est sans aucun doute mis sur les serments, les liens et la loyauté et sur leur puissance mais également leur potentiel destructeur.
Le personnage principal est un elfe, le Major Konowa Swift Dragon, mais c’est un elfe avec un passé troublé et la perception qu’il a de son héritage elfique est pour le moins conflictuelle. Son ennemie jurée est la Shadow Monarch, une sorcière-elfe de la même tribu que lui mais qui a, bien longtemps auparavant, rompu avec la tradition et le monde naturel pour sauver son seul amour. Les répercussions de cette décision se propagent dans le temps et amènent le monde au bord de la destruction totale, ou du moins de la transformation. Ensuite il y a Visyna Tekoy, une sorcière qui voit le monde naturel comme sacré. Elle incarne un grand nombre des tendances les plus écologistes que l’on voit dans notre culture aujourd’hui, et elle peut être fervente dans ses croyances. Il y a le Viceroy, un homme particulièrement passionné qui recherche le pouvoir et reste aveugle à tout autre besoin. Et il y a le faire-valoir de Konowa dans le régiment, le Prince de Calahr. Il est pourri gâté, il fait partie de la noblesse et la situation dans laquelle il se trouve le dépasse complètement – commander des troupes dans une bataille. Cela peut faire un peu cliché, mais de tels hommes ont peuplé l’histoire au détriment de ceux qui servaient sous leurs ordres. Je veux explorer ce dilemme plus en détail même si je ne suis pas sûr d’avoir un remède littéraire pour une telle incompétence flagrante de la part d’un dirigeant.
Q : Vous avez mentionné comment Visyna « incarne un grand nombre des tendances les plus écologistes que l’on voit dans notre culture aujourd’hui », et honnêtement, on dirait qu’une bonne partie des thèmes et personnages des livres sont un reflet des temps modernes. À quel point « A Darkness Forged in Fire » s’inspire des problèmes du monde réel, et à quel point est-ce important pour vous que vos lecteurs puissent trouver votre livre pertinent ?
Chris : Nous sommes tous des produits de notre environnement, même si cela ne signifie pas que seul notre environnement détermine nos actions. Bien sûr, les lecteurs retrouveront des problèmes modernes dans l’intrigue, mais ces mêmes problèmes sont universels et pas spécifiques à notre époque. J’explore les troubles de stress post-traumatiques avec plus d’un personnage dans le livre, et même s’il est évident qu’il s’agit d’un grand problème aujourd’hui avec la guerre en Iraq et en Afghanistan, ce n’est pas vraiment nouveau. Les êtres humains en souffrent depuis qu’ils ont commencé à se taper sur la tête avec des massues. Et la gestion de l’environnement est vieille comme le monde, aussi. Pour ce qui est de la pertinence, cela ne m’intéresse pas vraiment. Ce n’est pas un traité à peine déguisé sur le manie d’envahir un pays du Moyen-Orient ou quoi que ce soit de la sorte. Mon but dès le début a été de raconter une histoire et de divertir. Je veux être un romancier. Point. De la manière dont je le perçois, le meilleur compliment que je pourrais recevoir, c’est qu’un lecteur me dise qu’il a lu le livre en une nuit, qu’il lui a plut, et qu’il me demande avec impatience pour quand est prévu le prochain.
Q : Dans la fantasy, les illustrations de couvertures sont une question permanente, et plus particulièrement leur importance dans la vente d’un livre, le fait qu’elles soient considérées comme génériques, la différence entre les couvertures internationales et celles des États-Unis, etc. Qu’en pensez-vous et comment trouvez-vous la couverture de « A Darkness Forged in Fire » ?
Chris : J’étais super content quand j’ai vu la couverture la première fois. Elle est forte, audacieuse et simple, et cependant, elle fait sous-entend à une complexité cachée. Les illustrations de couvertures sont importantes, et elles le sont dans tous les genres. Les êtres humains sont des créatures visuelles. Lorsque vous marchez dans une librairie, vous ne sentez pas ou ne goutez pas un livre… j’espère. Mais vous le voyez. Vous voyez cette couverture et pour des raisons que vous comprenez, et d’autres non, elle vous attire. Je vois les couvertures comme des lumières qui clignotent conçues pour attirer votre attention. Si quelqu’un cherche de l’art pour l’art, il y a, hum, des galeries d’art conçues dans ce but précis (bien que même là vous puissiez trouver une étiquette avec le prix en bas de la peinture). Les illustrations de couvertures, d’un autre côté, sont faites pour vendre des livres. Donc ma seule préoccupation en ce qui concerne les couvertures, c’est leur efficacité à attirer le lecteur et lui faire prendre le livre. Si toutes les couvertures sont sombres et sérieuses, alors je pourrais suggérer de les éclaircir et de les alléger pour sortir du lot. Si la tendance est à l’adaptation fidèle, je pourrais vouloir aller vers l’abstrait et vice versa. Je pense simplement que vous ne pouvez pas vous permettre d’être trop affecté par ces trucs, ou du moins pas si vous voulez être un auteur payé. Le seul vrai débat que je vois en ce qui concerne les illustrations de couverture, c’est est-ce qu’elles attirent l’œil. Si oui, ça a marché. C’est très simple.
Q : Pocket Books semble avoir plutôt confiance dans votre nouveau livre, qui est soutenu par une solide campagne marketing comprenant de la publicité à la fois dans les publications nationales et sur internet, et le fait d’être annoncé aux Comic-Cons de New-York et San Diego. Que pensez-vous du soutien que reçoit le roman, et à quoi d’autre peuvent s’attendre les lecteurs en terme de promotion ?
Chris : Pocket a été formidable pour soutenir le livre. Écoutez, personne ne sait jamais vraiment ce que fera le livre en atterrissant sur les étagères. J’ai eu une fois un livre sur le débarquement écrit par un grand historien prévu pour sortir le jour du 60ième anniversaire du Jour J avec des apparitions sur les grandes chaines nationales de télévision, et puis Ronald Reagan est mort. La promotion des livres a été bouleversée après le 11 septembre. Vous ne savez simplement jamais ce qui va se passer. Cela dit, un auteur qui publie son premier roman ne pourrait pas en demander plus. Et malgré cela, j’étais ravi quand j’ai eu plus et que le livre a été acheté au Royaume-Uni. C’était un vote de confiance de plus et cela me donne l’occasion de m’engager avec plein de lecteurs différents. Pocket Books a vraiment fait plus que le nécessaire. Je dois vraiment remercier l’éditeur adjoint Anthony Ziccardi qui a lancé la machine et ne l’a jamais laissée s’arrêter depuis, et mon éditeur toujours énergique, Ed Schlesinger. Pour ce qui est de la promotion supplémentaire, Pocket a prévu une campagne dans la presse papier nationale, des courriers en masse, des envois d’exemplaires promotionnels, des évènements promotionnels comme la Comic Con et la BookExpo America, des évènements dans des librairies, de la publicité sur internet et bien plus encore. S&S Canada et S&S UK sont également impliqués et je travaille avec eux sur les initiatives marketing au Canada et au Royaume Uni. Encore une fois, je suis incroyablement impressionné par le niveau de soutien et d’enthousiasme que je reçois de la part de mon éditeur.
Q : Votre roman va en fait être présenté comme une sélection alternative pour le Science Fiction Book Club en août, ce qui est plutôt prometteur pour un début ! C’est cool, non ?
Chris : C’est très cool. Vous écrivez tout seul dans votre coin, et avant de vendre votre premier livre, vous vous demandez, enfin, ça a été le cas pour moi, si vous y arriverez un jour. Donc quand un éditeur vous fait une offre que vous ne pouvez pas refuser, c’est un sentiment merveilleux. Mais ensuite il y a toutes les autres possibilités auxquelles vous n’aviez pas beaucoup pensé, comme les droits à l’étranger, les clubs de livres, etc. C’est la cerise sur le gâteau, mais c’est aussi plus que cela. Chaque fois que vous vendez des droits supplémentaires, vous ne pouvez pas vous empêcher de ressentir une certaine justification que quelqu’un d’autre pense que votre livre a du potentiel et que cette personne soit prête à joindre l’acte à la parole. Donc savoir que le Science Fiction Book Club avait choisi mon livre m’a rendu heureux pendant plusieurs jours.
Q : Ces temps-ci, il est assez courant de voir des romans adaptés sous différents formats au cinéma, en bande-dessinées, en jeux vidéos, en dessins animé ou à la télévision. Comment aimeriez-vous voir adapter « A Darkness Forged In Fire » ?
Chris : Je serais enchanté de voir « A Darkness Forged In Fire » adapté. Roman graphique, jeu vidéo, film… c’est tout simplement carrément flatteur. J’ai une vision très pragmatique de tout cela et ma position c’est que si quiconque souhaite adapter ce que j’écris, je sais qu’ils ont leur propre vision pour leur propre support et je l’accepte. J’écris de romans, je ne fais pas des films, donc si un film devait se faire un jour, ma liste de « demandes » commencerait et s’arrêterait avec « dépôt d’un gros chèque sur ce compte ».
Q : L’année passée a été dure pour les auteurs de littérature fantastique. Plusieurs auteurs sont décédés, y compris Robert Jordan, Madeline L’Engle, Lloyd Alexander, Leigh Eddings, Fred Saberhagen, Jack Williamson, Alice Borchardt, et Kurt Vonnegut Jr., et on a découvert que Terry Pratchett est atteint d’Alzheimer. Et très récemment, la légende de la SF, Arthur C. Clarke, est décédé. Cela vous a-t-il affecté et y a-t-il quelque chose que vous souhaiteriez dire ?
Chris : C’est toujours triste, lorsque qu’une étincelle de créativité s’éteint. Je rajouterais à cette liste George MacDonald Fraser qui est décédé un peu plus tôt cette année. Sur une note un peu plus joyeuse, j’aimerais aussi profiter de l’occasion pour souhaiter force et espoir à Terry Pratchett pour faire face et même surmonter ce défi. De peur d’avoir l’air trop gentil, la raison c’est que, en partie, je veux continuer à lire d’autres aventures du Disque Monde. Je voudrais voir si c’est vraiment possible de se casser une côte à force de rire.
Q : C’est un but qui en vaut la peine ! Alors, quels sont les livres qui vous ont le plus impressionné dernièrement, que lisez-vous en ce moment, et quels sont les titres que vous attendez avec le plus d’impatience ?
Chris : À la Comic Con (de New York), j’ai eu l’occasion de rencontrer Naomi Novik. Elle a été assez gentille pour me dédicacer son premier livre. J’ai prévu de commencer à le lire dans un futur proche. Hélas, je n’ai pas eu le temps de lire beaucoup de fiction dernièrement, étant donné que mon job de lecture de manuscrits prend la plupart de mon temps. Quand je ne suis pas en train d’évaluer les travaux des autres, il se trouve que j’ai envie de me plonger dans le mien. Pour être tout à fait franc, les livres qui m’impressionnent le plus dernièrement ce sont ceux que mes auteurs écrivent, mais ça sent le favoritisme donc je ne donnerai pas leurs noms ici. Cependant, un lecteur audacieux devrait pouvoir les trouver sans trop de recherches.
Q : Quel auteur, selon vous, est sous-estimé et mérite plus d’attention, et pourquoi ?
Chris : Karen Traviss. Elle a un talent exceptionnel. Les critiques qu’elle reçoit de la part de certains viennent du fait qu’elle écrit des livres dérivés d’autres œuvres en plus de ses propres romans, comme si d’une certaine manière, cela les rendait, elle et ses livres, indignes d’être évalués comme des histoires légitimes par opposition à une simple petite partie d’un grosse machine multimédia. Avec cette logique, on peut se demander quel livre en vente dans un magasin ne fait pas partie de cette machine. Je ne dis pas que toutes ces histoires dérivées sont bonnes, ce n’est pas le cas, mais ce n’est pas le cas non plus de beaucoup de livres indépendants, à faible tirage ou en édition spéciale. Karen est une conteuse de première classe et je la vois attirer beaucoup plus d’attention dans les années à venir quand elle sortira sa prochaine série originale. En attendant, je suis un fan inconditionnel.
Q : Quelles sont vos autres activités ou passe-temps ?
Chris : Je vis à New York et on peut me voir quasiment tous les matins courir dans Central Park. Et le soir la plupart du temps, on peut me trouver dans un des milliers de restaurants de New York, ce qui explique pourquoi, eh bien, mon corps de coureur ne ressemble pas tellement à un corps de coureur. Et je suis, à mon grand regret, en train de devenir un pro des premiers rendez-vous. Puisque je n’ai pas encore trouvé Mme Parfaite, j’explore la ville avec des rendez-vous, ce qui pourrait bien donner un livre un jour…
Q : Eh bien espérons que votre chance tourne ! Pour finir, y a-t-il quelque chose que vous voudriez ajouter à propos de vous ou de votre premier livre à paraitre « A Darkness Forged In Fire : Book One of the Iron Elves » ?
Chris : Seulement que j’espère que les lecteurs connaitront au moins une partie de la joie que j’ai eue à l’écrire. Il est maintenant (ou sera bientôt) entre les mains des lecteurs. Pour un auteur, je ne peux pas imaginer de situation plus idéale. Maintenant, je dois retourner à l’écriture du second livre.
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