Y a-t-il eu un roman plus attendu, ces 5, 10, 20 dernières années ? Peut-être même plus pour sa sortie anglaise, y compris pour les fans français, en juin dernier, que maintenant... Toujours est-il que c'est le 3 décembre qu'Harry Potter et l'ordre du phénix est disponible en France.
Et c'est un bon livre, qui résiste bien au poids de l'attente. Mais cela reste un tome de transition, et cela se sent pratiquement tout au long de la lecture. On découvre un Harry déboussolé, qui voit certains de ses derniers repères se déliter autour de lui, pour ne pas dire plus. Un Harry en pleine crise d'adolescence, beaucoup moins lisse et convenu que ses détracteurs le pensent jusqu'à présent. On pourrait presque le faire passer maintenant pour un rebelle ! En forçant un peu le trait. Forcer le trait... C'est bien là le dilemme de ce roman. Passer un premier moment de jubilation de voir Harry défier l'autorité, quelle qu'elle soit, on se lasse de ces crise de nerfs et autres coups de colère sentant la mise en scène et non plus la spontanéité.
On entend de même la plume de J.K Rowling crisser sur le papier tandis qu'on tourne les pages, et plus particulièrement durant de longs et laborieux passages, dont l'un proche de la conclusion. (Ne soyons pas plus précis pour ceux qui n'ont pas encore pu mettre la main sur leur exemplaire !) Cela contribue à ralentir le rythme, pour aboutir à la réflexion que finalement, l'intrigue n'a pas tellement avancé en plus de 800 pages, quoiqu'elle soit maintenant plus claire. Ce n'est pas que le roman soit ennuyeux... Bien qu'on peut très bien le lire en plusieurs fois, sans être dévoré par l'envie de poursuivre à tout prix. Mais il lui manque un soupçon de flamme pour être aussi accrocheur qu'un Prisonnier d'Azkaban par exemple.
Il y a de nouvelles scènes très fortes, parmi les meilleurs de la saga sans aucun doute, mais on les retrouve éparpillées entre deux sous-intrigues à l'intérêt discutable, entre des révélations qui tombent un peu à plat par la force des choses, et par la "mort" d'un personnage, dont on se demande si l'auteur était sérieuse en affirmant qu'elle en avait pleuré en l'écrivant. Pour autant, il faut bien avouer qu'elle nous bouscule, n'hésitant pas à remettre en cause l'univers qu'elle a précédemment bâti. Du côté des personnages, certains seconds rôles s'étoffent joliment, des nouveaux venus entretiennent le mystère... Bref, on veut connaître la suite, pas de doute. Mais quand bien même on peut célébrer ce volume pour son ton plus sombre, plus "adulte", il risque bien de ne pas être parmi les 3 meilleurs une fois les aventures d'Harry terminées.
— Gillossen