Difficile de ne pas esquisser un bâillement poli à mesure que l’on tourne les pages. Et encore, faut-il avoir envie de le faire ! En dehors des fans absolu de l’auteur, on se demande en effet qui pourrait prendre un réel plaisir à « découvrir » ce roman.
Car l’on se retrouve ici avec le récit de fantasy épique le plus banal possible à concevoir, que ce soit au niveau de l’univers ou de l’intrigue, avec évidemment un monde menacé peuplé d’une foultitude de races à sauver. On imaginerait presque Salvatore en poser les bases sur un coin de nappe cinq minutes seulement avant de signer son contrat… Quant aux personnages, sans surprise, c’est un véritable défilé de clichés et de protagonistes aux motivations aussi épaisses qu’une feuille de papier. Sans compter que l’auteur semble même à deux doigts de se parodier lui-même, avec ces héros qui évoquent immanquablement certains de ses personnages les plus connus, dont Drizzt, évidemment.
Comment ne pas lever les yeux au ciel fort régulièrement ? Alors, oui, Salvatore se veut ici un peu plus violent, plus sombre, que la moyenne de ses écrits. Mais cette relative noirceur ne fait pas tout et univers violent n’a jamais signifié profondeur et richesse.
Bien entendu, comme pour compenser des faiblesses dont il doit tout de même avoir conscience depuis le temps – au mieux, on peut qualifier de Salvatore d’honnête artisan, et encore, il faut être indulgent… - l’auteur accouche d’un ouvrage boursouflé. Descriptions martiales se perdant régulièrement en détails inutiles, répétitions, discours grandiloquents... L’envie de sauter des passages entiers pour arriver plus vite en bout de course nous étreint plus d’une fois !
On ne reviendra pas non plus sur le caractère particulièrement affligeant du grand méchant de l’histoire, là aussi une caricature comme on n’en fait plus, et on jettera un voile pudique sur les personnages féminins. N’en jetez plus, justement !
On retiendra seulement le système de magie, un début de tome retenant relativement l’attention – en tout cas, nettement plus que la seconde moitié – et même l’humour involontaire qui surgit au détour d’une réplique ou d’une décision.
Ah, Corona...
— Gillossen