Alors que certains tomes de la série font clairement partie des  "locomotives" faisant avancer de manière significative  l’intrigue de la trame principale (comme Le siège de Cadanla, Heureux le guerrier mort ou les tomes sur les Elfes Bleus), d’autres  servent essentiellement à montrer les à-côtés de l’histoire et l’impact qu’a  l’arrivée de Lah’saa sur les Terres d’Arran. Ce nouveau tome, consacré  aux Semi-Elfes, appartient à la dernière catégorie (sans que cela soit pour autant un point négatif).
On retrouve la cité des  Semi-Elfes, créée par leur « Elu » dans le tome quatre, qui a bien évolué depuis cette époque. En effet, plusieurs  dizaines (centaines ?) d’années se sont écoulées et le discours de  l’Elu à ses compatriotes est tombé depuis longtemps dans l’oubli. La méfiance des semi-elfes, due aux siècles de maltraitance de la  part des autres peuples, s’est transformée peu à peu en haine.  L’ouverture d’esprit des premiers fondateurs de la cité a laissé place à  un repli des semi-elfes sur eux-mêmes. Voir le plus noble des buts lentement corrompu par la nature "humaine" est un message plutôt  pessimiste, mais ô combien réaliste.
Urghain,  héros de ce tome, lutte contre la corruption des élites qui poussent de  plus en plus le peuple des Semi-Elfes à se couper des autres peuples.  Mais ces dernières ne l’entendent pas de cette oreille et, après un  désaccord sur l’ouverture ou non d’une voie commerciale, le piègent  pour le faire tomber. Il devra donc survivre au jugement de la « Fosse »  qui donne son nom au tome. Il est cependant aidé par un inconnu des  plus massifs. Pendant tout ce temps, la menace des morts-vivants se  profile à l’horizon et deux choix s’offrent à la cité, combattre ou  s’allier au mal.
Que penser de ce tome ? Il est en dents de scie,  comme c’est malheureusement souvent le cas avec Corbeyran. Voir qu’une  extermination imminente peut faire changer l’opinion de personnes ne  voulant rien n’avoir à faire avec les autres nations est un principe de  base plutôt intéressant, mais le résultat est malheureusement trop bancal. Les personnages sont sous exploités ou stéréotypés, ce qui a  tendance à sortir le lecteur de l’histoire. Il en va de même pour leurs buts.  Par exemple l’étranger qui vient en  aide à Urghain, répondant au doux nom de Galn’aad, est la plus grosse déception de ce tome. Présenté comme  un puissant guerrier capable de défaire sans sourciller ses adversaires  de la fosse comme une troupe de goules, on ne voit pas du tout quelles sont ses motivations. Idem pour Gallah-Tern, un marchand humain qui doit  être l’un des pires stéréotypes vu dans ce tome, aussi bien dans son  attitude que dans son physique.
Tout cela est bien dommage, car il y a de  très bonnes idées, mais insuffisamment exploitées. Cobeyran essaye de  raconter une histoire intéressante de lutte de pouvoir, tout en  l’intégrant dans la Grande Histoire du monde que l’on suit depuis  maintenant depuis quinze tomes, mais le résultat est au final juste passable.
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