L'une des sensations fantasy de ces derniers mois revient déjà avec ce deuxième tome, tout aussi dense que le premier.
Brent Weeks poursuit-il sa montée en puissance crescendo ? Oui et non. Son premier roman n'était déjà pas sans défaut, évidemment, mais il réussissait à emporter le morceau, relativement facilement, grâce à ses personnages et son sens du rythme.
Ici, le rythme notamment patine à plusieurs reprises. C'est le cas par exemple durant la première partie du tome, lorsque l'on retrouve un Kylar s'interrogeant sur cette nouvelle vie qu'il tente de démarrer, loin des enjeux de la précédente par certains côtés. Ses doutes, ses questions, ses coups de sang, tout cela paraît souvent forcé, bien peu naturels. Ce comportement déçoit quelque peu, et on sent qu'il est avant tout question de faciliter pour l'occasion la tâche de l'auteur, pour amener son personnage et quelques autres à l'endroit exact désiré.
Cette sensation de facilité se retrouve également tout au long du roman, culminant lorsque Kylar apprend une information connue du lecteur depuis la fin du premier tome, concernant le sort d'un certain personnage. On imaginait comme conséquence directe quelque chose de beaucoup plus épique, un morceau de bravoure digne de certains passages du premier tome, justement.
Le positif l'emporte néanmoins largement sur le négatif, cette fois encore. Brent Weeks réussit plusieurs fois à nous faire toucher du doigt aussi bien la noblesse d'âme de certains que la noirceur immonde d'autres, voire l'ambivalence des mêmes ! Dans un cas comme dans l'autre, quelques pointes d'humour sont toujours présentes et parfois bienvenues, même si l'auteur sait aussi garder tout son sérieux lorsque les circonstances l'exigent expressément.
Et lorsque celui-ci passe la surmultipliée, comment ne pas se laisser emporter ? Le double final est une fois de plus parfaitement mené, avant de se conclure par une révélation finale que l'on trouvera aussi bien couillue que facile, une fois de plus, c'est selon. Weeks confirme en tout cas qu'il est bien passé maître dans l'art de distiller de bonnes doses d'adrénaline au moment propice, tout en développant petit à petit son univers, autre bon point de ce deuxième tome qui vire un peu plus épique à chaque page, quand bien même tous les chapitres concernés par le phénomène ne sont pas pour autant très palpitants par rapport aux actions de Kylar, Logan Gyre ou même le sinistre roi-dieu, figure autrement plus imposante que le Rat.
Pour conclure, un mot sur la vraie révélation du roman, le personnage de Vi, simple second rôle dans le premier tome et protagoniste à part entière de celui-ci, voire plus encore. Si la figure féminine qu'elle incarne n'est pas foncièrement originale en elle-même, l'auteur lui insuffle une indéniable présence et une épaisseur à la hauteur de l'impression faite, loin, très loin au-delà des seules apparences. Une « belle » réussite.
Une chose est sûre, après avoir parcouru les dernières lignes du roman, après plus de 500 pages parfois ébouriffantes... Kylar va avoir du pain sur la planche, dans bien des domaines !
— Gillossen