Ah, Margaret Weis et Tracy Hickman...
Dans la catégorie duo, on tient sans doute les quatre mains les plus connues du petit monde de la fantasy ! Il faut bien avouer que l'on a l'impression de les avoir toujours connus. Les Lancedragon, Les Portes de la Mort... On compte leurs romans par dizaines, ou presque, et tous les deux ont su déjà démontrer par le passé qu'ils pouvaient évoluer dans d'autres sphères que celles des univers de jeux de rôle.
Et c'est précisément le cas ici, avec le début d'un nouveau cycle entamé en 2009 seulement aux États-Unis et donc encore tout récent. Si vous appréciez les ambiances viking, vous serez sans doute sensible au choix des auteurs. Pour autant, l'univers lui-même n'a pas vraiment de personnalité sous cet angle. On retrouve de fait une atmosphère assez générique, qui évoquerait presque la vision cliché du cinéma hollywoodien dans ce domaine. Bref, nous ne sommes pas chez un Guy Gavriel Kay. Logique cela dit. On ne s'attendait pas à ce que Weis & Hickman changent brutalement leur fusil d'épaule, sans véritable raison d'ailleurs, étant donné leurs succès passés.
Rapidement, à mesure que les chapitres se succèdent sans réel temps mort mais sans réelle tension, il faut bien se rendre à l'évidence : si le roman s'avère sympathique, il reste finalement assez "léger", vite lu, vite oublié. Certes, certains concepts, concernant les dieux par exemple (ou les dragons), sont intéressants, et les aventures d'un Skylan jeté au milieu des luttes de pouvoir sont menées avec une certaine maîtrise, d'autant que les auteurs s'attachent à rendre le personnage moins lisse que nombre de héros du genre, surtout dans le domaine de la fantasy épique et des héros au sortir de l'adolescence.
Mais la chose semble parfois tellement forcée que Skylan en deviendrait presque antipathique, en tout cas, souvent exaspérant, par ses décisions ou son comportement, de façon plus générale.
Une chose est sûre, il n'est pas ménagé, comme la grande majorité des autres figures qui peuplent le roman d'ailleurs. Sans vouloir utiliser le terme "noirceur" souvent employé sans raison pour qualifier dernièrement le ton de bon nombre de romans, Weis & Hickman n'hésitent pas à trancher dans le vif si besoin est.
Entendons-nous bien : le roman au final n'est pas vraiment bancal, ne prête pas non plus le flanc à un défaut majeur, un point noir rédhibitoire. Mais en ces heures de surproduction, le lecteur de fantasy doit lui aussi parfois se montrer près de ses sous ("C'est la crise, ma bonne dame !"). Et ce roman n'est sûrement pas assez de caractère et d'allant pour que l'on se jette dessus à 25 euros.
Les fans du duo les plus assidus eux-mêmes pourront toujours jeter un oeil en librairie à la touchante postface dédiée à l'éditeur et ami de Weis & Hickman, Brian Thomsen, décédé trop tôt.
— Gillossen