Commençons par un petit point budget.
En publiant cette intégrale, Mnémos remet en avant des récits souvent oubliés depuis longtemps par beaucoup de lecteurs (la dernière édition de La Cité Pastel ou Le Signe des Locustes remonte à plus de 10 ans), sans en profiter de façon outrancière question prix. En effet, à 27 euros les 500 pages environ, on est loin de certains volumes atteignant quant à eux les 35 euros.
Mais trêve de considération mercantile : Viriconium, c’est avant tout une cité mythique comme la fantasy seule (?) sait nous en offrir, mais pas seulement. La qualité de la plume de l’auteur vaut pour beaucoup dans la réussite de la Cité Pastel, dans un roman qui n'incarne pas une banale quête, comme l’on pourrait le redouter au départ. Il s’agit clairement du point fort de cette intégrale, car la suite du sommaire alterne entre le (très) bon et le nettement plus dispensable, même si la donne ne change jamais sur un point bien précis justement : la qualité du style de M. John Harrison, sur laquelle Neil Gaiman en personne revient d’ailleurs dans la courte préface offerte ici.
En fait, outre évidemment la référence à Michael Moorcock qui vient vite à l’esprit (sur le fond comme sur la forme, une même fièvre les transporte), on se dit également que des auteurs comme China Miéville ont puisé chez Harrison pour nourrir leur imaginaire et la façon de le mettre en scène.
Mais chez Harrison, il y a surtout une notion de « flou artistique », de progression par la bande, qui fait que le manque de repères, qui plus est de plus en plus marqué au fur et à mesure que l’on passe d’un récit à l’autre dans le cadre d’une intégrale, représente un véritable moteur de progression en soi pour le lecteur.
A lui de garder pied ou de lâcher prise. Mais s’il est prêt à le faire - et même si, comme on peut l’imaginer avec une intégrale, tous les textes ne sont pas à mettre au même plan -, difficile de nier qu’il s’en trouvera récompensé.
Viricononium, c’est une destination à part, mais d'autant plus précieuse.
— Gillossen