Anne-Laure Bondoux n'est pas une inconnue en littérature, loin de là, puisqu'avant ce détour par nos contrées, les lecteurs ont pu par exemple mettre la main sur des ouvrages tels que Les larmes de l'assassin ou Le temps des miracles. Largement vanté par son éditeur, ce nouveau roman qui tourne essentiellement autour de ses deux personnages principaux et leur histoire d'amour intriguait.
A vrai dire, sa dimension "imaginaire" reste avant tout un canevas, une métaphore filée sur toute la durée du roman afin de nous dépeindre les tourments moraux ou émotionnels de ses héros, à la merci d'un monde en guerre aux contours à la fois flous et tragiques. Mais quel cadre ne l'est pas finalement ? L'auteur peut en tout cas compter sur une plume qui n'hésite pas à jouer la carte de l'émotion donc, mais sans mièvrerie (ou presque). L'ambiance du roman se veut même parfois sombre, et pas seulement du simple fait de son point de départ. C'est d'ailleurs une vraie réussite, cet univers hors du temps, tour à tour éthéré ou bien plus angoissant, qui ne se départit jamais d'une certaine poésie, voire se montre envoûtant.
Anne-Laure Bondoux nous invite donc à suivre un parcours semé d'embûches et de déchirements où l'espoir ne fleurit que rarement... mais se révèle sans doute d'autant plus précieux, bien entendu. A vrai dire, c'est une lecture qui reste en tête un certain temps... mais sans pour autant que l'on sache ce qui nous a le plus marqués, ou bien tout simplement manqués, pour commencer.
C'est un récit touchant, bien construit, dont on ne peut que reconnaître les qualités, dans les portraits esquissés, la mise en scène, la retenue parfois... Et si malgré tout le propos se fait de temps à autre naïf, il n'en demeure pas moins le souvenir d'un beau voyage. Il faut bien reconnaître cependant que Hama et Bo ne sont pas forcément les personnages les plus attachants qui soient, notamment par rapport à d'autres seulement aperçus, pour en rester à cette histoire. C'est un petit regret vu leur importance, d'autant que le roman pourrait bien laisser une partie de ses lecteurs en route pour une autre raison : structuré en 4 parties, le début est vraiment très lent, sans que l'on puisse avancer un réel intérêt du point de vue du récit.
Il se révèle donc à quitte ou double ou peu s'en faut : soit vous plongez dès le début dans cette toile savamment tissée, séduits par son univers et ses thématiques plus que par ses personnages, soit vous restez à l'écart face à ces nuances parfois si diffuses que l'on perd de vue le fil et ce qui nous a poussés vers cette histoire.
Mais qui sait de quel côté vous retrouverez-vous cette fois ?
— Gillossen