Dire que L’Appel des Illustres avait laissé à votre servante une impression positive serait un bel euphémisme. Pour un coup d’essai, ce premier roman de Romain Delplancq, avec son intrigue politique complexe, son ambiance de Renaissance italienne et son écriture tout en finesse, était un coup de maître. Restait à savoir si la suite serait à la hauteur… Inutile de tourner autour du pot : L’Éveil des Réprouvés tient toutes les promesses de son prédécesseur et parvient même à faire mieux dans un certain nombre de domaines.
La plus grande force du diptyque réside dans ses personnages, et de ce côté-là, l’auteur place à nouveau la barre très haut. Principaux ou secondaires, tous évoluent de façon intelligente et sensée au regard des épreuves traversées. Bien que toujours au cœur de l’histoire, Mical de Méris se fait plus discret dans ce volume, permettant à d’autres personnages de gagner encore en profondeur (Jiani Spadelpietra en tête).
Si le premier tome faisait la part belle à la musique et au spectacle, L’Éveil des Réprouvés laisse place à la vendetta et à l’art de la guerre. Les Austrois sont des ingénieurs de génie, et cela transparaît en temps de paix comme sur les champs de bataille. Mais bien que les bouleversements de ce volume affectent l’ensemble d’un continent, Romain Delplancq nous donne à voir le conflit à une échelle très intime, en ne s’éloignant jamais beaucoup des caravanes des clans et de ses principaux personnages.
La qualité d’écriture n’est évidemment pas en reste, et on peut souligner les effets de style déployés par l’auteur pour rendre le roman encore plus dynamique. Le découpage de certaines scènes, imbriquées les unes dans les autres, tient du montage de cinéma (sans spoiler, on peut évoquer le concert des noces de Jiani en parallèle de la mise en place du plan d’évasion des Austrois). Même la chronologie se met de la partie pour ménager encore davantage le suspense.
Si l’on devait émettre une seule réserve, ce serait sans doute la frustration de voir le sort de certains personnages passé sous silence – mais même là, difficile d’en vouloir à l’auteur, car en temps de guerre, le devenir des individus n’est pas toujours très clair. Et s’il s’agit plus simplement d’une porte ouverte pour une éventuelle suite, nous serons évidemment au rendez-vous !
La conclusion de cette chronique ne surprendra personne : Le Sang des Princes est une lecture hautement recommandable, et Romain Delplancq, un auteur à suivre de très près. « L’événement fantasy », dit le gros bandeau rouge sur la couverture. Pour une fois, l’accroche n’est pas usurpée !
— Saffron