Avec Jenny-Les-Vrilles, Jeff Noon nous propose une troisième enquête dans les pas de son privé John Nyquist, et se permet même de casser son moule.
Cette fois, point de ville tentaculaire aux méandres brumeuses mais une bonne vieille campagne qui n'est pas sans rappeler les petits villages anglais. Mais nous ne sommes pas non plus chez Barnaby ou Agatha Raisin. On comprend vite que l'on a affaire au traditionnel bourg en apparence charmant et peuplé de figures hautes en couleur mais qui cache un certain penchant pour les rites ancestraux, façon The Wicker Man (l'original, bien sûr...) ou plus récemment The Third Day. Là encore, les exemples ne manquent pas et là-dessus, Noon a au moins le mérite d'innover sur la forme de ce sous-genre, avec son village au calendrier imposant chaque jour une règle différente aux habitants.
Evidemment, John Nyquist arrive là-dessus comme un chien dans un jeu de quilles, à la merci des non-dits et des petits secrets de chacun. Cette enquête se révèle vite bien plus personnelle que les deux premières, puisque le privé se lance sur les traces de son père. Plus intime, aussi.
A ce titre, si ce thème du père disparu n'était pas vraiment au cœur des deux premiers tomes, mieux vaut sans doute tout de même les avoir lus pour profiter au mieux de celui-ci.
Pour le reste, on ne sait pas trop si le qualificatif d'enquête colle vraiment, tant notre protagoniste se retrouve balloté de rencontre en rencontre, un peu perdu. Ce qui est certain, c'est que l'auteur nous réserve encore un joli lot de personnages étranges et de cadre aux angles fascinants. Toutefois, des trois tomes publiés chez nous, ce Jenny-Les-Vrilles est peut-être celui qui parvient le moins à nous ébahir par ses concepts, le moins tortueux dans son cheminement (notamment quand on songe au grand final de La Ville des histoires). Et comme Nyquist, de par son caractère taciturne, n'est pas l'homme le plus facile à décrypter qui soit (même s'il n'est pas hermétique à ce qui l'entoure, au contraire), on peut demeurer un pas de côté plutôt qu'une main sur son épaule.
Quoi qu'il en soit, si vous vous êtes laissés tenter par ses précédentes enquêtes, celle-ci devrait à son tour amplement vous satisfaire !
— Gillossen