Un fleuve. Deux rives. Deux enfants. Une aventure.
Avec ce premier roman, Blandine Costaz nous entraîne dans un festival de petites histoires, de micro-aventures, qui toutes vont s’entrecroiser pour livrer le récit final.
Le lecteur suit les deux enfants en alternance, chacun allant son chemin dans une fuite en avant vers un point de jonction mythique, un pont jeté sur le fleuve, qu’ils espèrent l’un et l’autre exister.
Mais l’aspect mythique fait-il encore sens lorsque, comme Ethel, on multiplie les rencontres saugrenues à la manière d’une Alice visitant le Pays des Merveilles ? Sur la rive opposée, Charly n’est pas en reste, affublé d’un corbeau comme professeur de lettres qui l’oblige à lire chaque jour. Le bestiaire se développe au gré de l’histoire, chaque animal tour à tour adjuvant ou opposant, chacun ayant évidemment ses propres raisons d’intervenir (avec une mention spéciale pour l’Ours dont le rôle est digne d’un acteur shakespearien).
Si le récit semble court et assez simple d’abord, il s’avère assez vite qu’il n’en est rien. Le titre de l’ouvrage est un indice sur ce qui nous attend car effectivement, tout semble écrit sur cette étoffe dont sont faits les rêves. Il est impossible de distinguer l’illusion du réel et chaque fois qu’une révélation est faite ou qu’il nous semble avancer sur les sentiers de la compréhension, tout est mis en place pour qu’aussitôt un autre élément vienne nous faire douter de notre intuition. Jusqu’aux lieux qui ne sont pas annoncés clairement mais figurés par un symbole en introduction de chapitre (difficile de ne pas penser à la mise en page de La Horde du contrevent) et repris sur un signet qui permet de s’y retrouver. Si ce petit jeu graphique fait gagner du temps sur les descriptions et les explications et a le mérite de nous situer immédiatement dans la géographie fluctuante du récit, il contribue surtout à conserver au roman sa part de mystère et son identité singulière.
Tenant tout autant du voyage initiatique que du conte folklorique, empruntant aux univers slaves comme à la littérature populaire, De l’autre côté du songe est un ovni. Loin d’être un ouvrage exigeant, il faut tout de même accepter de ne rien comprendre et se laisser porter par l’histoire.
— Coeur de Chêne