La Première Guerre mondiale n’est pas un sujet franchement léger – comme toutes les guerres –, même si on met un peu de fantasy dans l’équation.
Katherine Arden nous emmène dans les pas de Laura Iden, infirmière, revenue chez elle, au Canada, après une mauvaise blessure récoltée au front. Laura qui va retourner de l’autre côté de l’Atlantique, donc, malgré sa jambe abîmée, pour tâcher de savoir ce qu’il est advenu de son frère. Le récit alterne entre les deux points de vue. La quête de Laura, le parcours de Freddie. Et pour les deux, ce sera un chemin de douleur. Voilà donc pour le programme général.
Bien sûr, le roman parle de la réalité de la guerre. Le froid, la peur, la mort qui est partout. L’enfer que furent les tranchées. Les blessures, les traumatismes. Les parenthèses de vie si décalées au milieu des charniers, et pourtant indispensables à la survie mentale des soldats. Mais nous ne sommes pas dans la mise en scène sanglante ou spectaculaire. Les descriptions sont plutôt factuelles, parfois même presque cliniques – et tant mieux, car il n’est nul besoin de surenchère sur ce genre de sujet. Ce sont les réactions des personnages qui vont donner la mesure de l’horreur.
L’autrice évoque aussi fort à propos ceux qui prennent les décisions, mais qui se tiennent soigneusement éloignés des combats. Il y a par ailleurs un gros travail de recherche qui a été effectué par Katherine Arden : de ce côté-là, donc, les bases sont solides et le contexte est documenté. L’histoire elle-même est prenante. D’abord, parce que le personnage de Laura devient vite attachant. Ensuite, parce que le point de vue de Freddie donne envie d’en savoir plus sur son sort. Si la note de fantasy n’est pas très marquée, elle flotte pourtant sur une bonne partie du récit, comme un fil rouge, et elle s’accorde particulièrement bien au contexte.
Entre amertume et goût de cendres, entrecoupé d’étincelles plus chaleureuses, Requiem pour les fantômes est assurément un beau texte.
— Erkekjetter