La librairie L'Astrolabe, Rennes - Xavier Dollo

Alors que 2023 vient de s'achever, quel serait votre premier bilan de cette année en Imaginaire (surtout fantasy) dans votre librairie ?

Notre bilan est forcément un peu biaisé pour plusieurs raisons. La première, nous sommes jeunes, nous devons nous faire connaître, et nous sommes dans un quartier en plein développement. La deuxième, c'est que nous sommes passé d'un petit local de 20m2 à presque 80m2 de surface de vente au mois de mai dernier. Troisième raison, nous sommes, à L'Astrolabe, généraliste. Même si l'imaginaire est évidemment un rayon fort, fort de notre expérience notamment, il n'est qu'un segment de ce que nous proposons. Ainsi, au final, et au regard de tout cela, notre bilan est encore et forcément celui d'un projet qui se lance. Toutefois, le rayon imaginaire commence à monter. Nos meilleures ventes sont de la fantasy, d'ailleurs. Mettons de côté Argyll où un trio de tête se dégage clairement : La Cité diaphane d'Anouck Faure, Trois battements, un silence d'Anne Fakhouri et Himilce d'Emmanuel Chastellière.
Hors Argyll donc, notre meilleure vente est l'anthologie Nous parlons depuis les ténèbres, parue aux éditions Goater sous la houlette d'Estelle Faye et Floriane Soulas, avec 90 exemplaires. Ensuite, on trouve François Baranger (Ars Obscura), suivi de près par Chris Vuklisevic (Du thé pour les fantômes), Isabelle Aupy (L'homme qui n'aimait plus les chats), Elisa Beiram (Le premier jour de paix) et enfin Becky Chambers (Histoires de moines et de robots). Ceci dit, le véritable indicateur sera l'année 2024, car nous aurons une année de ventes sur le même lieu, sans avoir en arrière-plan de déménagement à gérer, en étant enfin chez nous, tout simplement, et avec deux nouvelles super libraires, Anne (responsable librairie) et Lucie (notre alternante), qui trouvent progressivement leurs marques.

Avez-vous remarqué une nouvelle tendance émergente parmi les lectrices et lecteurs, un appétit pour un registre bien précis peut-être ?

Oui, bon, la romantasy, tout le monde le dit, c'est donc que c'est vrai. En tant que lecteur, La romantasy n'est pour l'instant clairement pas leur truc. Mais qui sait... si Becky Chambers ou Rivers Solomon s'y mettent !
Ce qui est certain, c'est que nos rayons brillent davantage, entre les merveilleux vernis sélectifs, les harmonieux embossages, les lumineux fers à dorer et les multicolores jaspages (le mot de 2023!), et parfois même l'alliance de tout ça. Quand c'est bien fait, je ne boude pas mon plaisir. Mais je vois surtout que 9 fois sur 10, on nous sert des faux reliés bâclés imprimés plus ou moins bien en Europe de l'est, et qui tiendront donc plus ou moins bien dans le temps. Après, les nouvelles tendances, les émergences, en tant que libraire je les laisse aux éditeurs et leurs services marketing car, si en tant qu'éditeur je m'y intéresse forcément, en tant que libraire je vends et conseille avant tout ce que je veux, et zappe plus ou moins dans les grandes largeurs ce qui ne me botte pas ou plus. Ce sont les lecteurs et les lectrices qui font le reste, et ils ont bien raison de lire ce qu'ils veulent. Donc, si une tendance émerge, bien sûr qu'on y sera attentif, bien sûr qu'on y sera réceptif dans ce qu'elle fait émerger de meilleur (j'ai des souvenirs d'excellentes bit-lit), et c'est aussi notre rôle de prescripteurs. Reste qu'à titre personnel, ce que je vends est le reflet du libraire que je suis (idem pour mes collègues), et je suis plutôt éclectique et tolérant, tant qu'on ne se moque pas des lecteurs et des lectrices. En imaginaire, nous avons assez naturellement une clientèle diversifiée, mais aussi assez engagée.

Poche et grand format occupent-ils toujours les mêmes parts côté ventes ?

Aucune donnée là dessus pour le moment. Seule véritable tendance, nos meilleures ventes sont du grand format.

Enfin, qu'attendez-vous de cette année 2024, en tant que libraire ?

Une confirmation de la hausse de fréquentation à la librairie. Une ligne de métro fonctionnelle (la ligne B du métro est out pour encore trois mois...), ça peut nous y aider. De bons livres, évidemment. Qu'Elbakin.net rajoute l'an prochain la question « Quel est votre coup de cœur de ce début d'année ? (Moi c'est Soif de Sang, le recueil de Rivers Solomon). Et une fin du monde encore repoussée, pour que tout ça puisse se mettre en place.

Propos recueillis et mis en forme par Emmanuel Chastellière.

Pages de l'article

1. La librairie Critic, Rennes - Etienne Vincent
2. La librairie L'Astrolabe, Rennes - Xavier Dollo
3. Le Nuage Vert, Paris - Eléonore Calvez
4. Christophe Brocard - rayon imaginaire Fnac Saint-Lazare
5. Librairie Légendarium, Arras - Pierre Debarbieux